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L'Europe aérienne et environnementale se construit à Strasbourg

7 juillet 2008

Les compagnies aériennes devront contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique à partir de 2012, même si leur contribution sera limitée pour éviter de trop fragiliser un secteur pénalisé par la flambée des prix du kérosène.

 J.-L. Stadler, CG67Les eurodéputés réunis à Strasbourg ont approuvé à une écrasante majorité mardi 8 juillet (644 voix pour, 30 contre), en deuxième et dernière lecture, un projet de loi plafonnant leurs émissions de CO2 à partir de 2012 et les obligeant à payer en partie pour la pollution générée. La législation doit encore être avalisée par les pays de l'UE, mais ce n'est qu'une formalité, le texte résultant déjà d'un compromis entre le Parlement et les Etats européens.

Il prévoit qu'à partir de 2012, toutes les compagnies aériennes qui opèrent dans l'UE, européennes ou non-européennes (sauf si leurs vols dans l'UE sont très limités), devront plafonner leurs émissions de CO2 à 97% de leur niveau de 2005.

Sur la période 2013-2020, le plafond sera à 95% du niveau 2005, puis pourra être révisé en 2020.

Intégrées au système de bourse européenne des émissions, les compagnies aériennes devront aussi payer, à partir de 2012, 15% de leurs permis de polluer. Voire plus à partir de 2013 puisque ce chiffre pourra être révisé.

L'Association internationale du transport aérien (Iata) et l'association européenne des compagnies aériennes, qui compte 33 sociétés dont KLM-Air France, British Airways et Lufthansa, ont exprimé leur mécontentement, la deuxième dénonçant une mesure d'opportunisme politique" qui va selon elle coûter "5,3 milliards d'euros" par an à ses membres.

La législation ne sera pas non plus sans conséquence pour les passagers: le prix d'un billet aller-retour pour un vol intra-européen pourrait augmenter de 2 à 9 euros, a indiqué mardi la Commission.

Pourtant, elle est plus douce qu'initialement envisagé: le plafonnement devait initialement commencer en 2011, les compagnies devaient payer 25% de leurs permis de polluer, et le négociateur du Parlement, le conservateur allemand Peter Liese, voulait qu'elles paient même la totalité d'ici 2020. 

"C'est clairement un compromis", a reconnu la secrétaire d'Etat française à l'Environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet, dont le pays préside l'UE. Mais selon elle, il était nécessaire pour "être en bonne position" en cas de contestation par des compagnies non-européennes, américaines en particulier. Le plafonnement a aussi été réduit pour tenir compte de l'explosion attendue du trafic aérien.

Si les émissions de l'aviation représentent actuellement seulement 3% des émissions européennes, elles ont presque doublé depuis 1990 et devraient plus que doubler encore d'ici 2020 à législation constante, selon la Commission.

Tous ces aménagements ont fait dire mardi aux Amis de la Terre que la nouvelle législation "aura peu d'impact sur la croissance fulgurante des émissions de CO2 de l'aviation".

Ils ont aussi fait des jaloux chez les industriels, notamment chez les sidérurgistes européens, qui menacent de délocaliser leurs usines s'ils doivent acheter 100% de leurs droits de polluer d'ici 2020, comme le propose Bruxelles.

Mme Kosciusko-Morizet a reconnu qu'ils risquaient fort d'utiliser cet argument dans les négociations en cours sur les compensations envisagées pour les industries les plus exposées, comme la gratuité d'une partie de leurs droits d'émission ou un mécanisme de pénalité pour les produits concurrents importés. Ce sujet fait l'objet d'âpres négociations entre pays de l'UE, qui espèrent arriver à un accord politique sur l'ensemble du plan de lutte contre le réchauffement climatique d'ici la fin de l'année.

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